Comme il le dit lui-même, Ashish Thakkar n’est pas un patron du type « Silicon Valley », un jeune étudiant devenu millionnaire en créant une application. Ses modèles seraient plutôt à trouver parmi les entrepreneurs « self made man ». Il cite volontiers Richard Branson, patron de Virgin, qui a réussi à créer un empire à partir d’une simple boutique de disques ; ou encore Ingvar Kamprad, créateur d’IKEA, qui a commencé sa carrière en vendant des allumettes aux habitants de son village.

La carrière d’entrepreneur d’Ashish Thakkar démarre alors qu’il n’a que quinze ans. Il gagne cent dollars en revendant son ordinateur à un voisin. Il prend là sa première et plus belle leçon d’économie : « avoir le bon produit, au bon moment ». Après cette transaction, il met à profit ses vacances pour se lancer dans les affaires. Il vit alors en Ouganda. Chaque semaine, il se rend à Dubaï où il se procure ordinateurs, disquettes, et autres produits high-tech qu’il revend sur un marché de Kampala. Son business marche si bien qu’à la rentrée des classes, il décide d’arrêter l’école. « Je peux continuer les cours, déclare-t-il à ses parents, mais à la fin je deviendrai entrepreneur alors autant que je le devienne maintenant ». Il prend une petite boutique et chaque week-end, il part se fournir à Dubaï.

Rapidement il décide de s’installer sur place. Il monte un commerce de gros destiné aux marchands voyageurs qui viennent s’approvisionner dans l’émirat. Il devra s’y reprendre à deux fois pour faire enregistrer les statuts de la boutique. A quinze ans, il n’est pas autorisé à posséder sa propre société. Il revient donc accompagné de son père, pour créer officiellement l’entreprise Mara.

Une décennie plus tard, Mara Group compte des activités dans une vingtaine de pays en Afrique. L’entreprise opère dans l’informatique, les télécommunications, la manufacture, l’agriculture, l’immobilier, l’hôtellerie et la banque. En 2010, Ashish Thakkar est distingué par le forum économique de Davos comme l’un des meilleurs jeunes entrepreneurs du monde. Il intervient par ailleurs comme conseiller économique auprès de nombreux chefs d’Etat africains.

Dans l’enfer du Rwanda

Sa réussite est telle qu’il fait la une du célèbre magazine américain « Forbes ». On lui octroie le « titre » de plus jeune millionnaire africain. Une distinction qu’il s’empresse de relativiser. « Si vous ne faites des affaires que pour l’argent, vous échouerez » déclare-t-il. Il rappelle alors un moment capital de son existence. Il a alors 12 ans et sa famille vit au Rwanda. Au moment de l’épisode sanglant du génocide des tutsis, il se retrouve coincé avec bon nombres d’étrangers dans l’hôtel « Rwanda ». L’histoire sera portée à l’écran sous le titre « Hotel Rwanda ». Cet évènement le marquera à vie. « Nous aurions pu avoir tout l’or du monde, dit-il, cela n’aurait rien changé à notre situation de réfugiés en sursit ».

Pour réussir en affaire Ashish Thakkar met en avant trois qualités : « il faut une vision, une éthique et de la passion ». La passion d’ Ashish Thakkar, c’est son continent, l’Afrique. Ses grands parents originaires d’Inde sont arrivés en Afrique au début du 20^ème siècle. Ses parents avaient une affaire en Ouganda, pays qu’ils sont contraints de quitter quand le dirigeant de l’époque, Idi Amin Dada, chasse tous les étrangers. La famille se réfugie à Londres où né Ashish Thakkar. Douze ans après, les parents décident de revenir en Afrique, pour s’installer au Rwanda avec l’épilogue que l’on sait.

L’Afrique nouveau centre de croissance

La grande ambition d’Ashish Thakkar est de parvenir à faire changer le regard du monde sur l’Afrique. Pour Ashish Thakkar, l’Afrique est d’abord un continent jeune, talentueux, dynamique, bien loin des clichés véhiculés par la presse. Le continent va devenir le nouvel épicentre de la croissance mondiale, Ashish Thakkar en est convaincu. « Il y a eu le tour de la Chine, celui de l’Inde, c’est maintenant le notre », déclare-t-il avec une mine réjouie. Pour aider à la réussite du continent, Ashish Thakkar a créé la Fondation Mara qui soutient et conseille des jeunes entrepreneurs africains. La Fondation Mara a passé un accord avec la Silicon Valley pour proposer des tutorats aux jeunes patrons du continent. C’est aujourd’hui plus 140 000 entrepreneurs africains qui ont reçu le soutien de la fondation.

Dans l’espace pour le continent africain

L’Afrique tient tellement au cœur d’Ashish Thakkar qu’il va l’emmener dans l’espace. Ashish Thakkar sera en effet le représentant officiel du Kenya, de la Tanzanie et de l’Ouganda lors du vol suborbital de la navette Virgin Galactic. A l’origine, Ashish Thakkar avait payé et réservé une place sur la compagnie de tourisme spatial par simple curiosité. Puis il a compris qu’il pouvait mettre à profit l’évènement pour apporter une autre vision de l’Afrique. « Là-haut, j’aurais mes petits drapeaux et le monde pourra voir que l’Afrique est au cœur de l’innovation ». Aujourd’hui, Ashish Thakkar partage son temps entre sa fondation et le développement de Mara Group.