La fièvre de l’espace gagne l’Afrique

Auteur 24 janvier 2018 0
La fièvre de l’espace gagne l’Afrique

Dans la nuit du 10 décembre dernier, une fusée emportant le satellite algérien Alcomsat-1 décollait de la base de Xichang, en Chine. Le lancement de ce satellite, placé en orbite à 36.000 kilomètres d’altitude, clôt une année 2017 riche en avancées dans le domaine de la conquête spatiale africaine.

Course aux satellites

La mise sur orbite d’Alcomsat-1 marque un nouvel épisode dans la course aux satellites à laquelle se livrent l’Algérie et le Maroc. En novembre 2017, le royaume chérifien lançait lui aussi, depuis le centre spatial de Kourou, son premier satellite, attisant les rivalités régionales. A visées militaires, l’engin, baptisé Mohammed VI-A, est-destiné à fournir des images très détaillées des lieux qu’il survole. De quoi inquiéter Alger et Madrid, qui craignent que leur territoire ne soit observé d’un peu trop près par un appareil capable de fournir chaque jour 1000 clichés en très haute définition. D’autant plus qu’un deuxième satellite d’observation marocain est prévu pour cette année, complétant le dispositif « Pléiades », mené en coopération avec Arianespace.

Ces lancements témoignent de l’intérêt que portent les pays africains à la conquête spatiale. Le Maroc et l’Algérie rejoignent ainsi l’Egypte, le Nigéria, l’Afrique du Sud et le Ghana dans le club des possesseurs de satellites, dont les données s’avèrent de plus en plus indispensables dans de nombreux domaines.

De l’importance des satellites

Qu’il s’agisse de télécommunication, de météorologie, de sécurité, de navigation ou de gestion des ressources naturelles, les usages revêtent une importance stratégique indiscutable. Avec une flotte de satellites opérationnels, les Etats africains seraient en mesure de prédire les changements climatiques, de surveiller des frontières difficilement contrôlables au sol, d’optimiser les rendements agricoles, de gérer ses ressources en eau, de lutter contre le braconnage, de faire face à la menace des groupes terroristes et de développer l’accès à internet ainsi qu’à la téléphonie mobile. Or, une nation dépourvue de satellite ne peut accéder à ces informations que par l’intermédiaire d’un pays ou d’une agence spatiale partenaire, souvent située en Europe.

Cette méthode, en plus de représenter une dépense non négligeable, constitue une barrière à l’indépendance d’un Etat ainsi qu’à la confidentialité des informations recueillies. C’est pour parer à ces inconvénients que, depuis l’aube du nouveau millénaire, certains pays africains se distinguent par leur volonté de posséder leurs propres satellites.

Une liste qui s’allonge

Premier pays à avoir ouvert le bal, l’Afrique du Sud a lancé son premier satellite en 1999, conçu en collaboration avec le Danemark. L’Egypte a emboité le pas, s’appuyant sur la Russie pour concevoir une série de satellites militaires. Car la géopolitique, tant au niveau régional qu’international, joue un rôle prépondérant dans les partenariats qui sont noués. Si le Maroc s’est appuyé sur la France, c’est la Chine, par l’intermédiaire du groupe China Great Wall, qui a été choisie par l’Algérie pour superviser la construction d’Alcomsat-1.

L’Ethiopie, qui ne cache pas ses ambitions de conquête spatiale, a d’ores et déjà commencé à élaborer son propre satellite, conçu sans l’aide d’aucune puissance étrangère, et qui devrait être opérationnel d’ici 2020. Le Ghana vient d’effectuer cette démarche, plaçant en juillet 2017 le premier satellite entièrement conçu en Afrique. Sur le continent, les agences spatiales fleurissent, drainant des capitaux tant institutionnels que privés. L’Union africaine, après être restée en retrait du mouvement, a voté en 2016 une résolution favorisant la création d’une Agence spatiale africaine en charge de coordonner les agences nationales.

Un avenir prometteur

Les pays longeant l’équateur, qui tirent un net avantage de leur situation géographique, ont vu ces dernières années fleurir les projets spatiaux. Le Ghana devrait être en mesure d’ici 2020 de fournir un site de lancement, tout comme la Côte d’Ivoire et le Gabon, ce dernier pays bénéficiant d’un accord conclu avec l’Agence spatiale européenne. Enfin, de nombreux acteurs privés se penchent de très près sur un continent riche de promesses. Le projet le plus significatif est mené par le groupe Airbus, qui devrait bientôt déployer 900 satellites de télécommunication au-dessus de l’Afrique, permettant ainsi à des régions reculées d’avoir accès à Internet.

Si l’élaboration et le lancement d’un satellite représentent un budget conséquent, les efforts menés en faveur de la conquête spatiale ne pourront être que bénéfiques pour un continent dont les satellites, à l’heure actuelle, ne représentent que 10 % du trafic mondial.

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