Premier leader noir de l’Alliance Démocratique (AD) depuis le 10 mai 2015, Mmusi Maibane ne cesse de surprendre par son éloquence et sa fulgurante ascension politique en Afrique du Sud. Du ghetto de Soweto au statut de « Barack Obama » sud-africain, retour sur son parcours.
Enfant de township, pasteur évangéliste et homme politique
A seulement 35 ans, le leader de l’AD revient de loin. Originaire de la province de Gauteng, Mmusi Maibane grandit à Soweto dans un des plus grands townships de Johannesburg au sein d’une famille favorable au parti historique de Nelson Mandela, le Congrès National Africain (ANC) au pouvoir depuis 1994. Ce diplômé en psychologie, administration publique et en théologie commence initialement sa carrière dans les affaires et ne se tourne pas immédiatement vers la politique. De confession protestante, il préfère prêcher à Liberty Church, une congrégation évangéliste de Johannesburg où il rencontre sa femme Nathalie dans les années 90.
Ce brillant homme d’affaires et pasteur accompli, a progressivement été déçu par la corruption de l’ANC, au point de rejoindre les rangs de l’opposition après la démission forcée du président Thabo Mbeki en 2008. Il est rapidement pris sous l’aile d’Helen Zille – alors présidente de l’AD – qui permet à cette jeune recrue « noire » de gravir les échelons dans ce parti « blanc » à une vitesse vertigineuse.
Ascension fulgurante de Mmusi Maibane au sein de l’Alliance Démocratique
Dès 2011, il représente l’AD lors des élections municipales à Johannesburg et obtient le score honorable de 34% dans une circonscription ralliée à l’ANC. La même année il se retrouve hissé au rang de porte-parole du parti, poste qu’il occupe jusqu’en mai 2014. Il quitte alors cette fonction pour représenter la liste de l’AD dans sa province natale du Gauteng pour les élections générales de 2014, et devient également le président du groupe parlementaire de l’AD.
Pour couronner son succès, le 10 mai 2015 il est élu avec plus de 90% des voix à la tête de l’AD lors du congrès fédéral du parti, devenant ainsi le premier Noir à présider l’opposition réputée « blanche ». Un tour de force pour l’AD, parti formé par les anglophones anti-apartheid et représentant les minorités ethniques sud-africaines. Ce jeune Noir dynamique constitue en effet une figure de choix pour séduire un électorat noir de plus en plus déçu par l’ANC mais encore réticent à voter pour un parti considéré comme conservateur et ne défendant pas les intérêts des Noirs – qui constituent tout de même 80% de la population sud-africaine.
Le nouveau Barack Obama sud africain ?
D’où lui vient ce surnom de Barack Obama d’Afrique du Sud ? Outre ses qualités exceptionnelles d’orateur, l’ascension fulgurante du « Barack Obama de Soweto » au sein de l’AD en l’espace de quatre années fait écho à la popularité acquise par Barack Obama avant sa première élection en 2008, également en quatre ans. Ces hommes politiques brillants ont su séduire aussi bien leur parti que leur électorat pour se hisser au rang de premiers leaders noirs de l’opposition nationale de leurs pays respectifs.
Plus concrètement, les campagnes de Mmusi Maibane rappellent celles de l’ancien candidat des démocrates, mettant en avant une communication simple et dynamique, relayant des slogans similaires sur les réseaux sociaux et jouant sur leur couleur de peau pour fédérer leur électorat. Les deux hommes ont également bâti leurs campagnes sur la disgrâce des présidents sortants : Mmusi Maibane construit son image politique sur une critique véhémente du président Jacob Zuma qu’il accuse d’être « un homme brisé à la tête d’une société brisée », ce qui n’est pas sans rappeler les critiques d’Obama à l’égard de George W. Bush.
Malgré ces similitudes frappantes, le nouveau leader de l’AD se départit de cette comparaison avec fermeté et refuse de se prêter à une rhétorique raciale en exploitant son image de premier leader noir – de surcroît marié à une femme blanche, un couple mixte qui ne laisse pas indifférent au pays de la nation « arc-en-ciel ».
Il reste à voir si la comparaison avec le « cousin d’Amérique » s’arrêtera ou se poursuivra lors des élections présidentielles sud-africaines de 2019, pour lesquelles Mmusi Maibane apparaît déjà comme un sérieux candidat.