En Afrique de l’Est, les pays produisent plus d’électricité qu’ils n’en consomment, la faute à une demande trop faible liée à des réseaux trop insuffisants.
Comment réussir à consommer l’électricité produite quand il n’y a pas les réseaux nécessaires pour l’acheminer ? C’est aujourd’hui le grand défi qui attend la région d’Afrique de l’Est où se situent le Kenya, l’Ethiopie, l’Ouganda, le Burundi ou encore le Rwanda. Confrontée à de graves manques en matière de production d’énergie il y a encore une quinzaine d’années, cette zone de l’Afrique s’est depuis rattrapée, profitant, entre autres, du programme Power Africa lancé par l’ancien président des Etats-Unis Barack Obama.
Des grands projets sont nés avec la construction des barrages de la Renaissance (Ethiopie) et d’Isamba (Ouganada), l’achèvement de la ferme éolienne du Turakana (Kenya) ou encore la centrale géothermique d’Olkaria (Kenya). Grâce à la réalisation de ces projets, la région devient un grand producteur d’électricité, profitant de taux d’ensoleillement records, d’un vent continu et de fortes pluies même si le réchauffement climatique tend à assécher la zone, faisant abandonner progressivement l’hydraulique au profit du géothermique.
7.850 MW produits pour une demande qui plafonne à 7.000 MW
En 2018, la capacité de production électrique d’Afrique de l’Est est estimée à 7.850 MW tandis qu’elle devrait grimper jusqu’à 10.340 MW d’ici cinq ans, en 2025. Problème : la demande reste limitée à 7.000 MW, chiffre estimé en pic de consommation. La région se retrouve donc en excédent énergétique, à l’inverse d’autres zones d’Afrique (notamment à l’ouest) qui souffrent d’un déficit. Il paraît alors incongru de voir cet empilement de watts alors qu’il n’y a aucun moyen de les consommer.
L’issue la plus pérenne serait de doter tous les foyers d’un accès direct à l’énergie. D’après un rapport de la Banque mondiale datant de 2017, seuls 9 % des habitants du Burundi ont un accès direct à un réseau électrique. Ils sont 22 % à l’avoir en Ouganda, 44 % en Ethiopie et 75 % au Kenya. Seulement, sur les trois-quarts des Kenyans ayant un accès direct, ils sont peu à l’utiliser de manière continue, la faute à un coût trop élevé. L’électricité est donc utilisée avec parcimonie pour un peu de lumière le soir, recharger un appareil mobile ou regarder la télévision.
Dans les autres pays, c’est surtout le manque de réseaux qui crée cette absence de demande. L’électricité produite ne peut être acheminée correctement en raison d’un manque de lignes ou d’interconnexions. Installer des réseaux reste un vaste problème car il faut acquérir des terrains pour les exploiter et donc très souvent, exproprier des foyers. Cela dans des pays où la majorité de la population vit en zone rurale.
L’interconnexion entre pays, solution la plus durable ?
L’une des solutions pour consommer cette électricité serait de développer davantage d’industries dans des régions où elles tardent à décoller. Les grands programmes d’industrialisation existent, notamment au Kenya dont Vision 2030 prévoyait de doubler la part d’industrie dans le PIB du pays de 5 à 10 % d’ici 2030. Mais ces programmes ambitieux peinent à décoller laissant de nombreux sites trop inexploités ou pas assez efficaces.
Finalement, la meilleure solution serait de miser sur des interconnexions afin que l’énergie produite puisse être distribuée aux voisins en déficit. L’Ethiopie doit déjà exporter son électricité vers Djibouti ou le Soudan sachant que plus au sud, la Tanzanie ou le Rwanda sont en déficit. La Banque mondiale finance déjà un projet de 600 millions de dollars pour connecter la Tanzanie à la Zambie.
Une façon de rapprocher l’Afrique de l’Est de l’Afrique australe et de parvenir à créer un réseau intercontinental du Caire au Cap. Avec une telle coopération entre Etats et régions du continent, la question de la distribution de l’énergie pourrait être vite réglée.
Sources des photos : latribune.fr / afdb.org /