L’enclenchement de la guerre au Mali a été une décision politique et géostratégique, de la part de François Hollande, unanimement salué par tous. Passée l’euphorie des premières semaines d’intervention libératrice, les questions qui fâchent ont commencé à émerger. Notamment sur les intérêts qui ont poussé l’armée française à partir en guerre. L’intervention armée menée par les Français et appuyée par les Tchadiens a tout d’un succès. Une force onusienne est appelée à prendre le relais pour bientôt. Mais la France ne lâchera pas de sitôt son pré carré.
Guerre malienne, côté cours
Mars 2012. Des combattants séparatistes entrent dans la ville de Kidal dans le Nord-Mali. Le capitaine Amadou Aya Sanogo demande une aide extérieure contre les rebelles qui conquièrent la moitié du Nord du Mali. L’indépendance du Nord-Mali, baptisé Azawad, est proclamée le 6 avril 2012 par le MNLA ou Mouvement pour la Libération d’Azawad. Dans la foulée, la charia est appliquée de manière stricte dans les principales localités de la région. La nation malienne sera tiraillée par les menaces islamistes d’une part, et des querelles intestines d’autre part. L’incapacité de l’armée nationale à trouver une cohésion a accéléré la chute rapide du pays. Les forces de l’ordre, désordonnées, n’ont pu repousser la progression des rebelles.
C’est dans ce contexte, et devant l’impuissance du président en place, Amadou Toumani Touré (Att), que le capitaine Sanogo prendra le pouvoir le 22 mars. L’officier prendra les commandes d’un pays en déroute. L’homme affirme vouloir rétablir l’intégrité du pays, mais c’est l’inverse qui se produit. Les forces du MNLA envahissent le Nord du pays en à peine deux semaines, faisant sombrer la moitié du pays dans la folie islamique. Investie d’une mission de libération, et sous le poids de sa responsabilité coloniale, la France choisit de partir en croisade contre les islamistes armés. Elle enclenche, le 11 janvier 2013, l’opération baptisée « Serval » visant à reconquérir les zones passées sous le contrôle des islamistes.
Guerre malienne, côté jardin
La situation actuelle semble démontrer que le Nord du Mali est en bonne voie de « pacification » totale, même si des poches de résistance continuent à mener de farouches oppositions. Le Président français François Hollande a toujours soutenu que l’intervention française dans le Mali était purement à vocation humanitaire et démocratique excluant tout calcul politique et économique. Malgré cette déclaration pleine de bonne volonté de la part du numéro Un français, rares sont les actions françaises, surtout au cœur des anciens prés carrés coloniaux, à être désintéressées. Les spécialistes affirment pourtant qu’aucun intérêt économique d’importance majeure n’est à défendre au Mali pour la France. Cette Nation traîne dans les bas-fonds des classements mondiaux en ce qui concerne le développement. L’exportation cotonnière est au point mort et les activités touristiques générées par les mausolées de Tombouctou ont été réduites à néant par le conflit armé.
L’intérêt français dans la région serait donc plus diplomatique et stratégique qu’économique. En effet, la stabilité du Sahel dépend grandement de la situation au Nord-Mali. Un pays frontalier comme le Niger, où des intérêts majeurs comme les mines d’uranium, sont très sujets aux tensions socio-politiques. Le géant français Areva est présent au Niger à Arlit, en phase d’exploitation, et à Imouraren, en phase de développement. La France n’a donc pas intérêt à voir le Sahel dans les mains des islamistes.
Pauvreté en surface, richesse dans le sous-sol
Le sous-sol malien contient de l’or et d’autres richesses qui demeurent largement inexploitées. Le pays est le troisième producteur africain du métal jaune, derrière l’Afrique du Sud et le Ghana. Le pays disposerait également d’une réserve non-négligeable d’uranium. C’est peut-être dans ce domaine que l’appétit de certains industriels est aiguisé. En effet, la compagnie minière canadienne Rockgate a déposé un permis d’exploitation pour un gisement d’uranium à Faléa. Les réserves de cette zone attendraient 12 000 tonnes d’uranium.
Aucune goutte d’or noir n’a encore coulé au Mali, mais les recherches ont admis une importante zone potentielle de pétrole. Le pays intéresse donc les majors pétroliers. Le groupe français Total arrive en première liste. Les immenses ressources énergétiques du bassin Taoudeni intéressent au plus haut point ce fleuron de l’industrie française.
Les réserves de gaz situées à la proximité de la capitale ne sont pas non plus à exclure. Sur ce chapitre, un gigantesque gisement a été découvert à Bourakèbougou, une localité située à 60 km de Bamako et 45 km de Kati, la ville garnison. Il s’agirait d’hydrogène à l’état pur (98,8 % d’hydrogène et 2 % de méthane et de nitrogène) et la poche n’est pas très profonde, car elle est située à seulement 107 m de la surface. L’hydrogène est une source d’énergie dans la production d’électricité. Si les potentiels maliens sont exploités à fond, le pays peut devenir exportateur énergétique dans la région.
Cela demeurera, comme tout le reste des aspects du développement d’ailleurs, dans le domaine de l’utopie sans une paix durable. Les Français l’ont bien compris.