Le groupe Bolloré est un géant français. Il est le prolongement économique de la puissance diplomatique française. C’est également une multinationale spécialisée dans la logistique. Comme tout géant français qui se respecte, Bolloré possède de nombreuses filiales en Afrique. Sur le Continent noir, Bolloré Africa Logistics est le premier réseau intégré de logistique. Cette relation entre la multinationale et l’Afrique est vieille de plus de 50 ans. Bolloré est présent dans 45 pays et fort de 250 filiales.
Le monopole Bolloré
Bolloré est présent au Cameroun. Il contrôle l’essentiel des infrastructures par lesquelles transitent 85% des importations du pays. Le groupe est présent dans divers secteurs : transport, manutention, plantation de palme, etc. Bolloré est l’opérateur de concession portuaire (Douala International Terminal) et ferroviaire (Camrail) au Cameroun. Ses activités ne se limitent pas seulement à la logistique. Elles s’étendent dans d’autres compartiments économiques. Ainsi, l’entreprise du milliardaire breton Vincent Bolloré est également actionnaire de Messapresse au Cameroun, filiale de Prestalis.
Si tous saluent unanimement le dynamisme économique du géant français en Afrique, les méthodes usitées n’y font pas l’unanimité. La privatisation des chemins de fer camerounais en 1999 a entraîné le licenciement de nombreux employés. L’indemnisation de 603 employés n’a pas été respectée. La modernisation du réseau promise n’a pas eu lieu. Ceux qui se sont levés au travers du chemin du géant en ont fait également les frais. Ainsi, Emmanuel Etoundi Oyono, l’ancien Directeur général du port autonome de Douala, qui s’est opposé à Bolloré, a été licencié. L’accointance politique du groupe avec la galaxie Biya est également montrée du doigt. Le groupe appuie solidement la fondation de Chantal Biya, la première dame du pays. Il a pris part au financement d’une radio animée par un prêtre proche du pouvoir.
Censure et répression
Cette proximité avec les gens du pouvoir et les combines qui en découlent est dénoncée, non seulement par la société civile, mais également par des auteurs engagés. Mais l’on ne touche pas impunément aux intérêts combinés de Bolloré et du régime Biya sans en payer la facture. Ainsi, l’écrivain camerounais engagé Bertrand Téyou en a goûté l’amère expérience. L’auteur de « L’Antécode Biya », « La Belle de la République bananière : Chantal Biya de la rue au palais » a subi les pressions du gouvernement du pouvoir avant de réussir à s’exiler en France.
Au Cameroun, il a déjà subi les affres de la « censure » qui ne dit pas son nom. En 2010, Messapresse, filiale de Presstalis dont le groupe Bolloré est actionnaire, décide de retirer de la vente tous les ouvrages de Bertrand Téyou. Pour Presstalis les intérêts financiers ont primé au détriment de la promotion de la culture et des libertés d’opinion. C’est aussi une manière de ne pas froisser le régime en place qui a adoubé le groupe Bolloré. Pour l’auteur, le harcèlement ne s’arrêtera pas au Cameroun. En France, suite à sa décision de faire un sit-in au siège de la société Presstalis, afin de dénoncer la rupture abusive et injustifiée de son contrat, entraînera son arrestation le 31 juillet dernier. Bertrand Téyou n’entend pas renoncer à sa cause. Même si les ondes de choc entraînent des victimes collatérales.