Depuis son indépendance, l’Algérie vit repliée sur elle-même, à travers une économie nationale presque entièrement tournée vers la rente d’hydrocarbures. La baisse du prix du pétrole de 2014 a été un choc pour le pays. Depuis, une véritable politique d’ouverture tend à se développer, tant au niveau économique qu’écologique et social. Le projet « Vision Algérie 2035 » vise à métamorphoser les structures internes du pays et d’en faire un État ouvert sur le monde.
Le programme « Vision Algérie 2035 » propose un éventail de projets innovants contrastant avec l’immobilisme du pays. Cette politique à virage libéral est insufflée par le gouvernement et largement soutenue par des institutions financières telles que la Banque mondiale. Son principal dessein est d’ouvrir le pays à la croissance, autrement dit d’y établir une économie capitaliste en y favorisant l’installation du secteur privé. Consciente du non-avenir de ses ressources, l’Algérie s’ouvre non seulement à un développement du secteur tertiaire, mais se concentre aussi autour de l’industrie d’avenir.
Ayant la volonté d’engager le pays « dans une vision globale » comme le précise la ministre de l’Environnement et des énergies renouvelables Fatma Zohra Zerouati, il s’agit pour le pays de produire 27 % d’énergies renouvelables sur l’ensemble des productions énergétiques d’ici à 2035.
Un premier regard donc vers le développement durable, poursuivi plus localement dans la capitale. Un complexe de valorisation des déchets est en projet dans la région du Grand Alger. La ministre ne cache pas que le projet doit se faire main dans la main avec des investisseurs étrangers, le but étant d’en faire un « produit économique ».
Alger sera la « perle de la Méditerranée » en 2035
Le webzine Algérie Focus publiait en 2016 une vidéo proposant le plan stratégique de la Wilaya d’Alger sur vingt ans (2015-2035). Ce film promotionnel acté par les autorités algériennes met en exergue les plans de rénovation et de renouvellement de la ville. Alors qu’un narrateur énonce les divers projets sur des images de synthèse, l’accent est mis sur le fait qu’Alger deviendra la « perle de la Méditerranée ». L’objectif est d’ouvrir la capitale sur le monde et de l’inscrire dans une politique de développement économique, social, culturel et durable.
Les projets sont titanesques et ils ont un axe commun : recentrer les piétons dans l’espace. Ainsi de nombreux boulevards de la ville seront reliés à des lieux de loisirs et de détente, comme le symbolique square Port-Saïd (d’ores et déjà en travaux) ou la création de la promenade de l’indépendance, qui mêlera histoire et patrimoine. Le front de mer se verra totalement réaménagé. Le port quant à lui sera délocalisé afin d’accroître sa capacité.
L’Alger du futur : une Alger verte ?
Afin de faire d’Alger une ville durable, le projet se penche sur l’objectif de désengorger la ville de son trafic dense, par la création de nouvelles routes, parkings et réseaux de transports connectés entre eux (tram, métro, train, bus).
Vient ensuite la volonté de réduction du mitage des espaces agricoles en périphérie au profit de la création de parcs urbains. Le but est de protéger les nappes d’eau mais surtout d’éviter le déploiement anarchique d’habitats informels et bidonvilles.
Pas un nuage donc à l’horizon d’Alger 2035 et le projet enchante les ambassadeurs européens. Mais tout ceci a un coût et des doutes apparaissent. En effet, offrir une ville prospère aux Algérois ne serait-ce pas le moyen de noyer le poisson afin d’établir une politique libérale soutenue par de nombreux investisseurs, dont, parmi eux, de nombreuses banques ? Ne seront-ce pas les Algériens qui paieront de leur poche ce virage économique ?
Un cas qui n’est pas isolé
D’autres pays émergents connaissent une rupture similaire et une ouverture libérale sur le monde, à l’instar de l’Arabie saoudite, elle aussi dépendante de la rente pétrolière. Son projet « Vision 2030 » vise à diversifier son économie à travers des réformes financières, politiques et sociales. Madagascar, à travers « Fisandratana 2030 » souhaite faire entrer le pays dans une économie de croissance, au profit de projets sociaux. Parmi d’autres exemples, le Kenya est symbolique. Suivant un modèle étatsunien avec sa Konza Technology City (à proximité de Nairobi), il devient la vitrine du high-tech en Afrique, via le plan « Vision Kenya 2030 », promettant des centaines de milliers d’emplois à une population jeune fortement touchée par le chômage.