Béji Caid Essebsi, le président de tous les Tunisiens et Tunisiennes

Auteur 4 mai 2015 0
Béji Caid Essebsi, le président de tous les Tunisiens et Tunisiennes

L’ex-Premier ministre tunisien Béji Caïd Essebsi a récemment été élu président en parvenant à réunir 55,68% des voix. Plus de la moitié des Tunisiens l’ont ainsi préféré au président sortant Moncef Marzouki. A bientôt 90 ans, celui qu’on appelle aussi l’héritier de Bourguiba cherche à construire une Tunisie moderne, unie, en respectant le désir de démocratie à l’origine de la révolution d’il y a quatre ans.

Fils d’agriculteur, Essebsi étudie le droit à Paris, où il s’engage notamment dans la vie associative franco-tunisienne. Avec son diplôme en poche, il retourne en Tunisie afin d’exercer son métier d’avocat, avec le soutien d’Habib Bourguiba Jr. Ce n’est qu’après l’indépendance que « BCE » intègre un poste ministériel. Il commence sa carrière politique en tant que secrétaire d’État adjoint, avant de devenir ministre de l’Intérieur.

Après une expérience en tant que ministre de la Défense, il quitte le gouvernement pour devenir ambassadeur de la Tunisie en France.

Lors de son mandat en tant que ministre des Affaires étrangères, sa gestion des crises diplomatiques est mise à l’épreuve, notamment par la guerre du Liban ou encore par l’opération « Jambe de bois ». Après cette période tumultueuse, il se tourne à nouveau vers le rôle d’ambassadeur de Tunisie, cette fois-ci en Allemagne de l’Ouest.

Après un bref retour en politique en tant que député puis président de la Chambre des députés sous la présidence de Ben Ali, il s éloigne des affaires d’État et ne revient qu’après la révolution du peuple tunisien. C’est alors qu’il prend la tête du gouvernement en qualité de Premier ministre et met en place l’élection de l’assemblée constituante, qui pose les grandes lignes du nouveau régime. Il laisse ensuite sa place à Hamadi Jebali, le secrétaire général du parti Ennahdha.

C’est donc après une très longue carrière de politicien qu’Essebsi fonde son propre parti, Nidaa Tounes, en 2012. Ce rassemblement tout nouveau s’impose aux élections législatives de 2014, et BCE va même ensuite jusqu’á gagner à l’élection présidentielle au terme d’un face à face avec Moncef Marzouki.

Le père de Nida Tounes – L’Appel de la Tunisie

A l’origine, le groupe politique Nidaa Tounes était une initiative d’Essebsi pour le rassemblement de l’opposition. Il a fondé cette initiative à la suite de son départ du poste de Premier ministre. Elle repose sur plusieurs principes et se fixe différents objectifs : mise en place d’un plan de sauvetage de l’économie nationale, émancipation de la femme, intérêt accru à la jeunesse et aux régions et populations en situation de précarité, respect de la justice sociale, sauvegarde des libertés collectives et individuelles comme la liberté de la presse et la liberté d’expression, et d’autres composantes d’une république moderne.

Le parti s’adresse à tous les acteurs de la vie politique du pays, en leur demandant de travailler ensemble – pas d’exclusion d’Ennahda ou des destouriens considérée par Essebsi comme anti-démocratique – à la sortie de la crise.

Lors de la campagne législative, Essebsi multiplie les interventions et les discours appelant au rassemblement. Cependant, beaucoup estiment que c’est bien lorsqu’Essebsi a déclaré, le 20 octobre 2014 – peu avant l’élection législative- que quiconque ne votait pas pour Nidaa Tounes était en fait un électeur d’Ennahda, que le parti a fait le plus grand pas vers la victoire. Il s’est ainsi permis de rassembler des électeurs de tous les partis centristes et démocratiques. C’est comme cela que, lors de l’élection, Nidaa Tounes, en symbole de la « modernité » politique du nouveau régime tunisien, s’impose et se retrouve représenté dans toutes les circonscriptions du pays.

Nouveau chef de l’État

Suite à la victoire de son parti aux législatives, le chef du nouveau parti majoritaire décide d’être candidat à l’élection présidentielle, qui a été la première élection libre et démocratique du pays. Il faudra deux tours de scrutin pour voir « BCE » s’imposer devant le président sortant Moncef Marzouki avec 55,68 % des votes en sa faveur.

Lors de sa campagne, Essebsi s’est notamment fendu de la déclaration suivante : « Si j’ai présenté ma candidature c’est parce que je pense qu’elle était utile […] pour le pays parce que je suis porteur d’un projet qui est de ramener la Tunisie à un État du XXIe siècle ». Ce discours rappelle tout le désir de modernité, de renouveau qui émane de la Tunisie depuis la révolution de 2011.

Parfois critiqué, notamment par des opposants politiques ou des militants salafistes, pour son âge avancé et les rapports privilégiés qu’il a entretenu avec Habib Bourguiba, Caid Essebsi peut malgré tout compter sur le soutien de nombreuses intellectuels tunisiens comme Abdelwahed Braham, Malika Ouelbani ou encore Fadhel Jaziri. Écrivains, historiens, artistes et philosophes ont notamment appelé à soutenir sa candidature lors de l’élection présidentielle.

Lors de son investiture, BCE assure qu’il a à cœur de veiller à garantir l’unité du pays, de rendre hommage aux femmes et au martyrs pour leur sens patriotique, de mettre en place des institutions constitutionnelles, conformément aux objectifs de la révolution. La lutte contre le terrorisme sera un autre de ses chevaux de bataille, assure-t-il. Depuis, il a notamment célébré le quatrième anniversaire de la révolution, avec un discours dans lequel il se déclare le président de « tous les Tunisiens et toutes les Tunisiennes ». Au sommet de l’Union africaine, sa première sortie à l’étranger depuis son investiture, il a insisté sur la lutte contre le terrorisme et l’importance de trouver une solution aux problèmes que rencontre la Libye.

L’avenir de Nidaa Tounes et la succession d’Essebsi

L’élection de Beji Caïd Essebsi à la tête de l’État a laissé un grand vide à la tête du parti Nidaa Tounes. Cette coalition d’horizons multiples se retrouve maintenant sans un organe de direction connu et reconnu. Il s’agit donc de trouver au plus vite un « consensus » afin de permettre à cette initiative démocratique de perdurer. Quant à Essebsi, il se doit ainsi qu’à tous les Tunisiens de préparer soigneusement sa succession afin que le pays ne rebascule pas dans une dictature, ni ne soit la proie de l’obscurantisme. Bon courage!

 

Ecrire un commentaire »