Sarah Diouf, jeune créatrice sénégalaise, a lancé en 2016 Tongoro, une marque qui a été popularisée par la star Beyoncé. Récit d’une success-story inspirante.
Lors de l’été 2018, des photos de vacances en Italie de Beyoncé suscitent une grande curiosité chez les amateurs de mode : quelle marque a dessiné les magnifiques tenues de vacances que porte la star internationale ? C’est à cet instant précis que le nom de Sarah Diouf, 35 ans aujourd’hui, commence à apparaître.
Déjà connue dans le milieu fermé de la mode, la styliste sénégalaise aux multiples origines se fait désormais une réputation auprès du plus grand nombre. Deux ans plus tard, en 2020, à l’occasion de la sortie du film musical « Black is King » de Beyoncé, la star planétaire s’affiche encore avec un pantalon Tongoro. Ce deuxième clin d’œil achève de propulser Sarah Diouf sur le devant de la scène. Un parcours incroyable pour celle qui, avant les photos de vacances d’Italie, avançait discrètement avec de bonnes idées et beaucoup de talent.
Sarah Diouf, c’est d’abord l’histoire d’un métissage qui puise ses influences aux quatre coins de l’Afrique. La styliste a beau posséder la nationalité sénégalaise, elle est avant tout Africaine et se définit comme tel : « Je suis une enfant de l’Afrique ». Son père, sénégalo-congolais et sa mère, sénégalo-centrafricaine, contribuent à ce métissage autant que son enfance, passée à Abidjan. Sénégal, Congo, RCA, Côte d’Ivoire… Mais aussi la France puisque Sarah Diouf doit quitter Abidjan en 2000 suite au coup d’Etat pour s’installer à Paris, une ville où elle est née et où elle va vivre jusqu’en 2016.
Une volonté précoce de valoriser l’Afrique
Sarah Diouf n’est pourtant pas prédestinée à devenir une créatrice de mode. Ses études sont orientées commerce puisqu’elle obtient un master en gestion de communication et de marketing en 2009. Mais sa sensibilité pour la mode ainsi que son désir de valoriser son continent d’origine l’incitent à lancer très vite Ghubar, un webzine qui veut promouvoir des artistes originaires d’Afrique ou du monde arabe et qui œuvrent dans le monde de la mode ou de la culture. En 2015, elle lance le magazine Noir, un semestriel dédié à la femme africaine.
En même temps, elle constate l’engouement autour du tissu africain, qu’elle imagine comme porteur d’identification culturelle. Appréciant particulièrement l’étoffe, elle réfléchit à la création d’une marque 100 % made in Africa pour promouvoir l’artisanat du continent. En s’installant à Dakar en 2016, elle poursuit cette idée et ne tarde pas à mettre au point une stratégie en recrutant quatre tailleurs dans son atelier, tout en faisant régulièrement appel à huit autres. Son objectif, produire une centaine de pièces par mois. Son style se perçoit rapidement : des manches amples et des combinaisons où les jambes sont élargies.
Tongoro est 100 % local et 100 % e-commerce
Tongoro, qui veut dire « étoile » en sango, la langue principale de la Centrafrique, nait donc en 2016 en adoptant un style unique et reprenant l’iconographie africaine à travers des éléments de nature ou des influences des premiers grands photographes du continent. Le noir et le banc, d’abord dominants, sont peu à peu agrémentés d’autres couleurs, à la demande des clientes de Tongoro.
Le marché de Tongoro est très majoritairement international et principalement aux Etats-Unis, devant le Royaume-Uni ou la France mais aussi le Moyen-Orient. En Afrique, c’est au Nigéria et en Afrique du Sud que Sarah Diouf parvient à vendre ses collections. La jeune femme met à profit sa formation en gestion pour maitriser les codes de l’e-commerce qui représente 100 % de son marché.
L’autre défi pour la jeune créatrice est de parvenir à produire 100 % local, en s’appuyant sur des ressources présentes au Sénégal. Mais le pays ne possède pas une industrie développée en matière de mode et Sarah Diouf doit sans cesse anticiper en formant de nouveaux tailleurs. Sans quoi, son expansion sera freinée.
En attendant de produire davantage de volumes, la qualité de Tongoro est au rendez-vous et les plus grandes stars internationales comme Beyoncé, Alicia Keys ou Naomi Campbell servent de vitrine pour populariser une marque qui veut remettre le Sénégal et l’Afrique sur le devant de la scène.
Photos : seneweb.com / pagnific.com / vudaf.com/