Arrivé au pouvoir en 1986 par les armes, Yoweri Museveni, l’homme qui a mis fin aux cauchemars successifs que furent les dictatures d’Idi Amin Dada (1971-1979) et de Milton Obote (1966-1971 puis 1980-1985), était considéré comme le messie ougandais qui allait affranchir le pays du poids de ses dictateurs. Plus de deux décennies après, il est devenu leur équivalent, voire pire, selon certains. Yoweri Museveni est l’un des dirigeants africains qui a passé le plus de temps au pouvoir. Toujours animé par un esprit combattant et rebelle, il apparait de temps à autre en treillis et armé. Le jargon militaire fait partie intégrante de son langage, comme pour faire ressurgir son passé de guerrier.
Profil de révolutionnaire
Enfant de la seconde guerre mondiale, Museveni a une longue expérience de la lutte armée. Nourri aux idées révolutionnaires de Mao Tsé-toung, de Lénine ou de Karl Marx, Museveni conjugue la politique et la lutte armée. Ses années estudiantines au Mozambique nourriront ses idées. La période post-Idi Amin Dada en Ouganda, lui fera enfin occuper des postes importants. Museveni se verra attribuer les postes de ministre de la Défense, de ministre chargé de la Coopération régionale et de vice-président du conseil militaire. Les élections de 1980 seront pour lui et son parti, l’Uganda Patriotic Movement, un cauchemar. Ils seront écrasés par l’Uganda People’s Congress de l’ancien président Milton Obote.
Ce sera un retour aux sources pour lui. Considérant que les élections ont été truquées, il reprendra les armes où il formera la National Resistance Army (NRA) et son aile politique, le National Resistance Movement (NRM). Il combattra farouchement le régime d’Obote durant cinq longues années. La lutte s’achèvera par le coup d’État du lieutenant général Tito Okello, le 26 juillet 1985. Okello sera renversé six mois plus tard par la NRA, le 26 janvier 1986. Yoweri Museveni devient président de la République d’Ouganda.
L’homme de l’occident
Ayant pris le pouvoir par la force, Yoweri Museveni promet néanmoins de réformer la politique et de réduire la violence dans le pays. Dès qu’il accède au pouvoir, il est salué par le monde entier, notamment l’occident, comme étant un progressiste. Converti au libéralisme et suivant les préceptes du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale, il est adoubé par les occidentaux, notamment les américains. En guise de reconnaissance, l’Ouganda bénéficie d’aides économiques importantes qui permettent de soutenir la croissance. Cela entraîne une stabilité économique et une paix pour le pays. L’Ouganda repose sur une richesse pétrolière importante. Le pays est en passe de devenir l’un des principaux producteurs de pétrole en Afrique. Toutefois, 35 % de la population vivent sous le seuil de la pauvreté.
Au fil des années, le règne Museveni tourne au vinaigre. Pour, à la fois, museler l’opposition et pour verrouiller le pouvoir, il maintient un système politique du « Mouvement », censé mettre fin aux dérives ethniques du passé. Malgré les dérives anti-démocratiques et surtout népotiques, l’occident lui voue une confiance inconditionnelle. A l’image du Premier ministre éthiopien, Mélès Zenawi, le président ougandais demeure un allié incontournable dans la lutte contre le terrorisme dans la région et dans le continent.
Opposants opprimés
Dans ce monde politique ultra-verrouillé, l’opposition est quasiment réduite à néant en Ouganda. En effet, le gouvernement de Musavesi n’hésite pas à réprimer les manifestants de la rue. Sur des questions telles que l’abolition de la limite des mandats présidentiels, le président ougandais est intransigeant. En 2011, il s’est de nouveau présenté, et fut élu, pour un nouveau mandat. Le terrain politique étant particulièrement dangereux, les opposants doivent trouver d’autres parades pour exprimer leurs idées. Le virage littéraire est une piste adoptée par les militants, malgré la censure du gouvernement.
C’est souvent à travers les écrits et les publications que les courants anti-Museveni sont transmis dans la société ougandaise. L’une des figures emblématiques de l’opposition, Norman Tumuhimbise, a publié un livre, intitulé « Behind the Devil’s Line ». L’homme qualifié de « diable » serait le président en exercice. L’ouvrage n’a pas particulièrement plu aux autorités. Ainsi, l’auteur a eu toutes les peines du monde pour distribuer son pamphlet. Aucun éditeur n’ayant accepté de publier le livre, Norman Tumuhimbise a dû passer par la case autoédition. Pour la distribution, c’est un réseau d’amis et d’hommes de confiance qui a permis de mettre sur le marché l’ouvrage. Ce dernier a récolté un succès d’estime dès sa publication. Écoulé à 16 000 exemplaires, le livre militant met particulièrement en exergue les dérives du régime ainsi que l’«arrogance» du président Museveni. L’auteur n’hésite pas à le comparer à Mouammar Kadhafi à travers ses actes et ses actions.
Un portrait passionnant pour une histoire vraiment prenante.
Une histoire africaine. Heureusement cet écrivain redonne de l’espoir.