Akinwumi Adesina, le fermier devenu le patron financier de l’Afrique

Auteur 9 juillet 2015 0
Akinwumi Adesina, le fermier devenu le patron financier de l’Afrique

Le 28 mai 2015, le nigérian Akinwumi Adesina succède au rwandais Donald Kaberuka lors de l’élection du président de la Banque africaine de développement (BAD). L’ancien ministre de l’Agriculture et du Développement rural du Nigéria sera, dès le 1er septembre 2015, à la charge de la principale institution financière du continent. Le huitième président de de la BAD aura pour mission d’établir des stratégies financières efficaces dans un continent en constante mutation, où les disparités restent importantes. Regard sur le parcours d’un président au parcours original couronné de succès, qui s’apprête à relever un défi d’envergure.

Akinwumi Adesina est né au Nigéria le 6 février 1960. Il est originaire d’une modeste famille de fermiers de l’état d’Ogun, au sud-ouest du pays. Malgré de faibles revenus, il parvient à poursuivre de brillantes études à la réputée université de Purdue aux Etats-Unis, d’où il ressort diplômé d’un doctorat en économie agricole en 1988. La même année, il reçoit une bourse de chercheur à la fondation Rockefeller, avec qui il collabore par la suite en tant que représentant pour la zone sud-Afrique, de 1999 à 2003. Il occupe par ailleurs divers postes à responsabilités aux Etats-Unis, ainsi qu’en Afrique dans le secteur de l’agriculture.

Economiste réputé, ministre applaudi

Spécialiste du développement agricole, le docteur Adesina collabora avec l’Alliance pour une Révolution verte en Afrique (Agra), organisme mondialement soutenu, où il accède au poste de vice-président des politiques, qu’il occupe jusqu’en 2010.
Il rejoint ensuite le gouvernement du président Goodluck Jonathan au poste de ministre de l’Agriculture. Lors de son mandat, Adesina parvient, entre autres, à redresser un secteur auparavant négligé en augmentant considérablement la production agricole domestique, créant ainsi 3 millions d’emplois.

Ses réformes sont grandement applaudies par les paysans nigérians et accroissent énormément la popularité du ministre. Il est d’ailleurs salué au niveau international en étant nommé « personnalité africaine de l’année 2013 » par le magazine américain Forbes. Nul doute que ses « exploits » durant ses quatre années de mandat ont fortement contribué à sa récente nomination en tant que huitième président de la Banque africaine de développement.

Un nouveau rôle à assumer pour Akinwumi Adesina

Elu au 6ème tour du scrutin avec plus de 58% des voix, il représentera désormais une institution pesant près de deux milliards d’euros d’investissements annuels. Avec sa future prise de fonction, Adesina aura la lourde tâche de succéder à Donald Kaberuka, qui avait réussi à relever une banque au bord de la faillite. Aujourd’hui, les voyants des finances de la BAD sont au vert, avec un capital autorisé triplé à hauteur de 91 milliards d’euros.

C’est donc avec sérénité que l’homme au nœud papillon va pouvoir se pencher sur la réorientation des investissements sur le continent. Si certains déplorent la nomination d’un représentant du Nigéria, le nouveau rouleau compresseur économique de l’Afrique, premier actionnaire de la banque avec 9,3% des parts, et y voient une opportunité pour ce pays d’assouvir sa supériorité, ce n’est pas le but d’Adesina, qui promet d’être « un président humble et responsable ». Un « serviteur des africains » qui n’oublierait personne, notamment les pays considérés comme « petits ».

En effet, l’ex-ministre nigérian à l’intention de continuer un combat qui est le sien depuis de nombreuses années, à savoir la réduction des inégalités de richesses entre les pays, et de la pauvreté toujours très présente dans le continent. Il compte ainsi rééquilibrer les investissements jusqu’alors essentiellement dirigés vers le Nigéria ou le Kenya en ciblant en priorité les pays plus fragiles.

Pour ce-faire, le nouveau président Adesina espère bénéficier de l’aide de fonds internationaux tels que la Banque mondiale ou le FMI afin de cofinancer de nouveaux projets. Il n’oublie pas aussi de poursuivre ce qui a été son cheval de bataille lors de son mandat de ministre, comme les mesures de relance de l’économie rurale et de l’activité agricole, et la création d’emplois. Il espère en étendre le succès au niveau continental.

Etre à la hauteur de la réputation de la Banque africaine de développement

Le nouveau responsable de la Banque africaine de développement va donc pouvoir relever un des plus importants challenges de sa vie. Il semble en tout cas motivé et enthousiaste, se disant « très ému » et conscient d’avoir hérité d’une « grande responsabilité ». Son profil et son parcours parlent pour lui. Ayant connu la pauvreté dans sa jeunesse des années 60 au Nigéria, le combat contre la misère lui tient à cœur. Devenu un spécialiste de l’économie et du développement agricoles, il a prouvé lors de son mandat de ministre qu’il était un candidat crédible à la présidence de la BAD.

Applaudi de ses pairs, élu pour ses capacités et non pour sa nationalité malgré la pression évidente de son pays d’origine pour le voir à la tête de l’institution financière de l’Afrique, il devra se montrer à la hauteur d’un organisme cinquantenaire redevenu solide qu’il dirigera dès la rentrée prochaine.

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