L’Afrique sans frontière, plus qu’une utopie ?

Auteur 24 août 2016 0
L’Afrique sans frontière, plus qu’une utopie ?

L’union africaine (UA) s’est récemment réunie au Rwanda à l’occasion du sommet annuel de l’organisation. Les 54 chefs d’Etat membres de l’UA se sont mis d’accord sur leur intention de concrétiser la mise en place du passeport africain. Annoncé le 5 avril 2016 par la présidente de la commission de l’UA, Nkosazana Dlamini Zuma, ce passeport permettra la libre circulation des hommes et des marchandises sur le continent. Plus d’un milliard d’africains pourraient alors se déplacer librement dans les 54 Etats de l’union, sans visa. Un projet d’envergure qui ressemble aux accords de Schengen permettant la libre circulation des personnes au sein des 26 états européens membres, accord signé en 1985 et mis en œuvre à partir de 1995.

L’idée utopique d’unir le continent africain

Cette idée ne date pas d’hier : l’UA avait déjà officialisé en 2013 son intention de créer ce passeport unique. Une première mondiale puisque si le projet devient réalité, l’Afrique pourrait être le seul continent muni d’un passeport unique. Cette année, lors son sommet annuel, l’UA a délivré ses premiers passeports expérimentaux à des personnalités politiques comme le président de l’Union et président tchadien, Idriss Déby ainsi que Paul Kagame, le président rwandais.

Dans un premier temps, la commission exécutive délivrera ses passeports aux hommes politiques et aux diplomates. La distribution aux citoyens africains n’est prévue que pour 2018. Les relations diplomatiques sont encore difficiles entre certaines nations. Afin de renforcer l’intégration des pays africains, chaque Etat devra simplifier les procédures pour obtenir le libre échange des biens et des personnes, sans visa. Certains pays servent d’exemple comme le Rwanda, le Ghana, la Mauritanie ou les Seychelles qui ont rapidement facilité les démarches d’obtention de visa.

A ce jour, le Maroc est le seul Etat africain qui ne fait plus partie de l’Union. En 1984, le pays s’était retiré de l’organisation de l’Unité africaine, ancienne Union africaine en signe de protestation de la reconnaissance de la République arabe sahraouie. Une admission aujourd’hui toujours remise en cause par le Royaume qui souhaiterait réintégrer l’UA mais qui renonce à reconnaitre l’indépendance du Sahara Occidental.

Une proposition révolutionnaire

Le passeport unique démontre une réelle motivation de la part des pays africains d’unir le continent en abolissant les frontières intérieures. Les citoyens africains conserveront leur passeport national et seront munis d’un e-passeport africain, délivré par l’UA. Aujourd’hui, il est très difficile pour les Africains de voyager. Selon un rapport de la Banque africaine de développement, un ressortissant africain peut se déplacer sans visa dans seulement 45 % des pays du continent même si certains citoyens africains ont plus de privilèges que d’autres. A titre de comparaison, un Américain peut se déplacer dans plus de 55 % des pays africains sans obtenir de visa. Les déplacements sont alors plus simples pour un Américain que pour un Africain.

Ce passeport commun permettrait d’améliorer et de simplifier les flux internes de plus d’un milliard d’Africains, permettant au détenteur du document l’entrée et le séjour d’une période de 30 jours sans visa dans tous les pays du continent. Cela constituerait une avancée dans la coopération entre chaque Etat africain. Si pour l’instant, seuls certaines personnalités pourront bénéficier de ce passeport, beaucoup restent sceptiques face à ce projet utopique.

Renforcer le climat de sécurité, de paix et de démocratie entre les Etats

Le continent est encore sujet à des malaises politiques et socio-économiques : conflits armés, famine, épidémies, inégalités, dictatures… le passeport africain n’est pas encore prêt de voir le jour. Bien que l’idée se concrétise d’année en année, certaines conditions sont encore un frein à la mise en place d’un accord durable de libre circulation sur le continent.

Afin d’unifier durablement le continent, il faut repenser, à l’échelle des pays, à toutes les procédures d’intégration économique et commerciale et assurer une coopération sur le plan sécuritaire. La collaboration entre les pays du continent est la plus faible au monde et la libre circulation des biens et personnes est encore très restreinte. Pour rendre effectif ce passeport, l’Afrique devra d’abord renforcer le climat de sécurité, de paix et de démocratie entre les Etats. En tout cas, un tel projet pourrait prouver que l’Afrique sait aussi être à la pointe de l’innovation.

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