L’incubateur allemand Rocket Internet est en passe de devenir un géant de l’internet. Souvent critiqué pour ses méthodes agressives, il se développe à grande vitesse sur tous les continents. Depuis deux ans, Rocket Internet dispose d’un bureau parisien. Sacha Poignonnec et Jeremy Hodara en sont les deux directeurs généraux.
Qui y en-t-il en commun entre Kaymu, Jumia, Lamudi, Jovago, Zando, Easytaxi, Hellofood, Westwing, DropGifts et HelloFresh, eDarling et Wimdu ? Toutes ces entreprises sont développées dans le giron de l’incubateur Rocket Internet. Rocket Internet est en passe de devenir l’un des géants mondiaux du business 2.0. Un succès qui s’appuie sur une stratégie de croissance agressive. Le business model de Rocket Internet fait même grincer des dents. L’incubateur est qualifié par certains concurrents d’usine à cloner des startups. Le concept est né en Allemagne, à Berlin, en 2007, développé par les frères Samwer. Il s’agit ni plus ni moins de copier les plus gros succès du net. Une fois repérés, les business sont dupliqués et développés à grande vitesse selon une méthode éprouvée. La « copie », ainsi créée peut espérer prendre une position avantageuse sur le marché et même parfois devancer « l’original ».
Transformer une idée en succès
C’est au bureau parisien de l’entreprise que les startups françaises et africaines de Rocket Internet sont gérées. A deux pas de la Bourse, deux jeunes français Jeremy Hodara (31 ans) et Sacha Poignonnec (33 ans),veillent sur les destinées de ces entreprises. Ils sont depuis janvier 2012 co-directeurs généraux de Rocket Internet France et Afrique.
Depuis qu’ils sont en fonction l’incubateur a lancé en France et en Afrique une quinzaine de startups dans 13 pays différents. Pour Sacha Poignonnec, les critiques adressées à Rocket Internet sont un mauvais procès. Il serait bien difficile, selon lui, d’identifier celui qui le premier a vendu un produit sur Internet. La question de la copie et de l’idée originale est donc un faux problème. Tout le travail de l’incubateur (Rocket Internet préfère parler d’accélérateur de croissance), doit se concentrer sur la transformation d’une bonne idée en succès.
1,8 milliard d’euros en deux ans
Et c’est là que le savoir-faire de Rocket Internet intervient. Pour l’incubateur, il s’agit de frapper fort et de viser d’emblée l’excellence. Pour tenir ces objectifs, Rocket Internet ne lésine pas sur les moyens. Moyens humains d’abord, en quelques mois à peine Jumia, « l’Amazon » africain est passé au Nigéria de 5 à 500 employés. On peut aujourd’hui estimer à plus de 2500, le nombre de personnes employées dans les startups Rocket Internet en France et en Afrique. Moyens logistiques ensuite, toujours au Nigeria, Jumia dispose de son propre service de livraison avec une flotte de 120 camions et un entrepôt à Lagos de 9000 m2. Moyens en compétence, les dirigeants des startups sont recrutés à un niveau MBA de grande école de commerce, avec une expérience dans la banque ou le business. Sacha Poignonnec est diplômé de l’EDHEC et Jeremy Hodara de HEC. Avant de rejoindre Rocket Internet, ils ont tous les deux travaillé pour le cabinet McKinsey à Paris et New-York. (McKinsey est numéro 1 mondial des cabinets de conseil internationaux). Rockets Internet dispose à Paris d’une équipe d’experts (Internet, marketing, achat, RH, droit) qui est mise à disposition des startups jusqu’à ce qu’elles deviennent autonomes. Enfin, moyens financiers, Rocket Internet a réussi à lever 1,8 milliard d’euros au cours des deux dernières années.
Une idée, des équipes, des moyens
Une idée, des équipes et des moyens, la méthode est semble-t-il fructueuse. Malgré quelques couacs, comme Bamarang, une startup dédiée à la vente d’objets de design en France, disparu trois mois à peine après sont lancement, les projets de Rocket Internet affichent une belle santé. Certains même ont réussi à devenir une référence. C’est le cas de Jumia qui a reçu en octobre 2013, le prix du meilleur lancement de l’année au World Retail Congress de Paris. C’est la première fois qu’une entreprise africaine est récompensée au niveau mondial dans le secteur de l’Internet. Voilà de quoi donner le sourire à Sacha Poignonnec et Jeremy Hodara. C’est au fond la meilleure réponse qu’ils pouvaient apporter à leurs détracteurs.