Annulation de la dette en Côte d’Ivoire

Auteur 18 février 2013 0
Annulation de la dette en Côte d’Ivoire

Offensive de l’opération « séduction »

Après une décennie de soubresauts politiques associés à une crise post-électorale, le pouvoir d’Alassane Ouattara multiplie les actions de charme auprès de la communauté internationale. Sur le plan de la sécurité et de la réconciliation, les hommes du président ivoirien usent de toute leur force de persuasion et de leur magnanimité pour trouver des solutions idoines concernant la reconstruction. La quasi-totalité des grands argentiers ont annulé leur dette vis-à-vis du pays d’Houphouët-Boigny. Malgré le boom économique qui galvanise les bailleurs de fonds institutionnels, 20 mois après son arrivée au pouvoir, Alassane n’a pas encore totalement rassuré tous ses compatriotes quant à la sécurité.

 

Entre le marteau et l’enclume

L’un des gestes majeurs opérés par Alassane Ouattara depuis qu’il a regagné le palais de Cocody est sa main tendue à l’opposition. La nomination par exemple d’Ahoussou Jeannot, ex-PM, le 9 janvier 2013 au poste de ministre d’Etat auprès du président de la République, est une preuve tangible, pour la communauté internationale, de la résolution définitive de la crise. Mais le chemin est encore malheureusement long. Le volet sécurité demeure l’épineux dilemme du Président. Conscient de cette situation, il a donné des consignes fermes que suit le «maître » de la sécurité, Hamed Bakayoko, ministre de l’Intérieur. C’est donc une sécurité maximum qui règne dans les rues des villes ivoiriennes, d’Abidjan en particulier. Les patrouilles mixtes FRCI-Police sont présentes en permanence dans les grandes métropoles. Sécurité ne cohabitant pas avec molestation, selon certains analystes politiques, Alassane Ouattara est néanmoins pris entre le marteau et l’enclume. Faut-il sévir de peur de se voir farouchement indexé par les activistes des droits de l’Homme ou laisser le temps résoudre le problème ? C’est là l’un des enjeux sur lesquels le locataire de Cocody est très attendu.

 

Solidarité financière

Pour revenir sur les grands chantiers de la reconstruction qui sont déjà entamés, le Programme national de développement (PND), que dirige le ministre d’Etat, Mabri Toikeuse, constitue la cheville ouvrière de l’émergence, que vise la Côte d’Ivoire à l’horizon 2025. A Paris, les 4 et 5 décembre 2012, 4 300 milliards de FCFA est le montant de la cagnotte qui a été consenti par les bailleurs de fonds institutionnels au pays d’Houphouët-Boigny. Selon certains spécialistes, ce sont ces actes qui confirment la solidité et la stabilité financières du pays. Autre preuve : les 24 et 25 juin 2012, le FMI et la Banque mondiale ont approuvé l’atteinte du point d’achèvement de l’initiative PPTE (Pays pauvres très endettés) par la Côte d’Ivoire. Ainsi, dans la même lancée, ses créanciers, en l’occurrence ceux du club de Paris, ont annulé sa dette de plus de 99%, soit la somme de 3 248,3 milliards de FCFA.

La France, à elle seule, a soulagé le pays de 1 324 milliards de FCFA dans le cadre du contrat de désendettement- développement (CDD). Les États-Unis également ont signé, le 1er février 2013, un accord d’annulation de la dette ivoirienne : 214 millions de dollars, soit 98,3% des sommes dues à Washington, tandis que, le 08 février 2013, la Grande-Bretagne a emboîté le pas aux Etats-Unis d’Amérique, qui ont consenti à effacer une ardoise de plus de 100 milliards de FCFA au profit de la Côte d’Ivoire, et ainsi, 32 millions de livres sterling (soit 25 milliards de FCFA) ont été annulées par le pays de David Cameron. C’est l’ambassadeur Simon David Tonge qui a annoncé la bonne nouvelle : «Nous devons être clairs sur un point important : notre annulation de la dette de la Côte d’Ivoire est une marque de confiance en son avenir », a-t-il souligné. Dans le cadre de l’accord bilatéral avec le club de Paris, la Grande-Bretagne a déjà annulé, l’an dernier, avec le ministre de l’Economie et des Finances d’alors, Charles Koffi Diby, 39 milliards de FCFA de dette ; ce qui porte à 64 milliards de FCFA l’ensemble des efforts consentis par la Grande-Bretagne.

 

A qui profite la cagnotte ?

Grâce à toutes ces ressources dégagées, la Côte d’Ivoire renaît de ses cendres économiquement. Les chantiers poussent comme des champignons : comme le 3e pont en construction, dénommé Henri Konan Bédié, qui désengorgera le trafic Cocody-Marcory. La livraison sera impérativement faite à Noël 2014, a déclaré le premier ministre, Kablan Duncan, le 12 janvier 2013. Le vieux projet de construction de barrage de Soubré, enseveli depuis trois décennies environ, sera exhumé grâce au concours de la Chine, qui a donné 239 milliards sur les 331 nécessaires pour sa construction. De passage à Abidjan du 6 au 9 janvier 2013, la directrice du FMI, Christine Lagarde, a loué les prouesses du pays des Eléphants. «Quand on regarde les -5% de 2011 et les 8,5% au moins pour l’année 2012, on constate que les résultats sont au rendez-vous», affirma-t-elle après sa rencontre avec Alassane Ouattara. Réputé pour être un pays qui a toujours su cultiver et matérialiser les valeurs d’intégration, la Côte d’Ivoire voudrait davantage renforcer étroitement ses liens avec les pays voisins. Le projet de doter le Burkina Faso d’une «Maison du Burkina» à Abidjan remonte à 1994. Mais pour diverses raisons, il n’a pu être réalisé. Ce projet, pourrait reprendre vie d’ici quelques mois, a affirmé l’ambassadeur du Burkina en Côte d’Ivoire, Justin Koutaba. C’est un immeuble de R+ 15 qui abritera l’ambassade burkinabè sur les 4 premiers étages, et les 11 autres seront loués à d’autres services. Le coût estimatif de cet immeuble est de 30 milliards de FCFA ; une partie sera supportée par le Burkina Faso, et une autre par les Turcs et d’autres partenaires.

 

Le bout du tunnel est encore loin

C’est entre doute et espoir que les Ivoiriens entament le vingtième mois de l’avènement d’Alassane Ouattara au pouvoir. Le peuple n’est pas totalement rassuré. Une paix voilée semble planer sur la capitale économique et politique ivoirienne, et les activités semblent en apparence se dérouler normalement, mais il faudra du temps et une accalmie de longue durée pour rassurer totalement les Ivoiriens, qui sont toujours sous l’emprise du «typhon» qui les avait secoués tragiquement pendant la période postélectorale.

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