Une arrivée pas très discrète
Un Airbus A330-200 privé n’est pas commun, surtout quand l’avion atterrit sur une base militaire. 30 avril 2013, un appareil du même type, avec à son bord quelque 200 personnes, se pose sur le tarmac de Waterkloof, la principale base de la force aérienne sud-africaine dans la banlieue de Pretoria. Après que leur avion eut bel et bien foulé le soul sud-africain, les convives sont escortées par la police sud-africaine de l’aéroport jusqu’au complexe touristique de Sud City. La raison d’un tel dispositif exceptionnel : le « mariage de l’année » d’un couple hindou. La fille est Vega Gupta, agée de 23 ans, d’origine indienne, issue d’une des plus riches familles d’Afrique du Sud; et son fiancé, Aakash Jahajgarhia, 24 ans, diplômé d’une université de Londres. Ce faste n’est pas du goût de tout le monde. Mais c’est surtout l’utilisation abusive de la piste par l’armée de l’air sud-africaine qui fâche et qui irrite. Un incident diplomatique éclate entre Pretoria et New-Delhi. Waterkloof est un site stratégique dont l’accès est strictement limité à des usages gouvernementaux et militaires.
L’héritière, Veda Gupta
Veda Gupta est une héritière de la famille Gupta. Une richissime dynastie d’origine indienne très influente et très proche du président sud-africain Jacob Zuma. D’ailleurs, de nombreux intérêts de cette famille sont présents dans la Nation Arc-en-ciel. C’est également un donateur fidèle de l’ANC. Le quotidien New Age, la voix de l’ANC, est également une propriété de la famille Gupta. Les Gupta sont donc très bien cotés du côté des gens du pouvoir. Par ailleurs, les deux fils du président Zuma ont déjà travaillé comme directeurs au sein d’entreprises appartenant à la famille Gupta.
Le Guptagate
C’est donc un fastueux mariage qu’ont organisé les parents de Gupta. Pour rendre unique cet événement, la grande famille en Inde a été invitée. Le mariage s’est très bien déroulé mais la polémique suscitée par l’« abus » de la part de la famille Gupta n’a pas fini d’enfler. Le passe-droit octroyé à l’avion affrété n’a pas été du goût de tout le monde, l’affaire est baptisée le « Guptagate ». Quelques jours après l’événement, des têtes sont tombées au sein de l’administration sud-africaine. Des responsables du ministère des Affaires étrangères et de l’armée ont été suspendus de leurs fonctions. Six ministres sud-africains sont montés au créneau lors d’une conférence de presse commune le vendredi 3 mai. Le parti au pouvoir, pourtant bénéficiaire de la générosité des mécènes que sont les Gupta, n’a pas mâché ses mots sur la faveur octroyée par le régime, tout comme de nombreux politiciens fustigeant le viol de la souveraineté sud-africaine. Pour tenter de désenfler la polémique, la famille Gupta a bien essayé de s’excuser publiquement mais rien n’y a fait.
Les uns et les autres se rejettent la responsabilité. L’ambassadeur d’Inde à Pretoria est soupçonné d’avoir demandé l’autorisation d’atterrir et triché sur la formulation pour l’obtenir. Les ministres ont tenté d’esquiver en affirmant qu’aucune autorisation officielle n’avait été accordée pour l’atterrissage de l’aéronef. Le résultat d’une enquête complète rendra le verdict et mettra en lumière la responsabilité des uns et des autres.