On le sait, il faut réduire le nombre de déchets dans les rues. Mais comment gérer tous les déchets produits chaque jour ? Des solutions existent et de nouveaux acteurs apportent des idées en matière de collecte, tri, transport ou encore de recyclage des déchets. Jeunes ou moins jeunes entrepreneurs, ils veulent changer les comportements. Fabrication de nouveaux objets ou valorisation des déchets par la création d’énergie : découverte de ces nouvelles initiatives présentes sur le continent africain.
Un monde de déchets
La gestion des déchets est une question complexe et un sujet qui touche toutes les villes du monde. Aujourd’hui, chaque année, environ 1,3 milliard de tonnes de déchets dits solides sont générés dans les centres urbains. Mais les disparités sont importantes. Ainsi plus le revenu moyen des foyers est élevé plus ces derniers génèrent un nombre important de déchets. Le continent africain est donc aujourd’hui le plus petit producteur de déchets, comparé aux autres régions du monde. L’Afrique sub-saharienne par exemple génère chaque année 62 millions de tonnes de déchets, alors que les pays de l’OCDE en génèrent 572 millions. Mais du fait du manque d’infrastructures, les déchets s’accumulent et les décharges se multiplient dans la grande majorité des villes africaines. De plus, le développement urbain et démographique sur le continent africain a tendance à multiplier ce phénomène.
Les projections avancent que la population urbaine en Afrique va plus que doubler d’ici 2035. Et qui dit plus d’habitants, dit encore plus de déchets. Quels sont les acteurs en charge de cette épineuse question ? Les pouvoirs publics bien sûr ont un rôle important dans la gestion des déchets mais aujourd’hui de nouveaux acteurs s’engagent.
Ça roule au Lagos avec Wecyclers
A Lagos, au Nigéria, Bilikiss Adebiyi a imaginé des collecteurs à deux roues et tout un système de points pour responsabiliser les citoyens et redonner de la valeur aux déchets. Primée au Cartier Women’s Initiative Award, cette jeune entrepreneuse a monté Wecyclers en 2012. L’idée est de collecter des déchets recyclages, tels que les bouteilles en plastique, sacs en plastique et canettes en aluminium, avec des vélos équipés de chariots. Chaque famille possède un compte et accumule des points en fonction du poids de ses déchets triés et peut ensuite utiliser ces points pour s’offrir des biens de consommation courante, ou encore des minutes de communication. L’entreprise revend ensuite ces déchets triés à des entreprises spécialisées dans le recyclage.
Créer de l’utile…
Mais alors recycler pour faire quoi ? Recycler les sacs en plastique pour leur donner une nouvelle vie ! C’est l’idée qu’a eu l’ancien footballeur Roger Milla, avec sa fondation Cœur d’Afrique, basée au Cameroun. Après un traitement chimique, les sacs en plastique sont transformés en pavés pour la construction de routes. Ce type de projets avaient déjà été conduits au Niger et au Mali notamment. Les déchets plastiques sont donc revalorisés, modifiés. C’est également la mission de l’entreprise sociale kenyane fondée par Lorna Rutto. Dans son atelier de Nairobi, EcoPost transforme les déchets plastiques en poteaux, barrières, clôtures. Ce produit est donc une alternative durable et éco-responsable au bois.
Ou du beau : le cas d’EcoShoes
Le recyclage de déchets peut aussi créer de l’art et, par exemple, devenir une matière première pour l’industrie de la mode ! Au Ghana, l’entreprise EcoShoes transforme dans ses ateliers les déchets en sacs à main et escarpins. Sa fondatrice, Mabel Suglo, a été récompensée par le prix Anzisha 2015 décerné chaque année aux jeunes entrepreneurs d’Afrique.
Une autre entreprise sociale, Solerebels, fondée en Ethiopie en 2005 fabrique elle aussi des chaussures à partir de matériaux recyclés comme les pneus. Et au Kenya on redonne une nouvelle vie aux déchets électroniques. Alex Mativo, jeune fondateur d’E-Lab, pense que pour éliminer tous ces e-déchets il faut les transformer en objets d’art, de design ou de mode… Son atelier crée ainsi des sculptures, des horloges ou encore des bijoux. Sa matière favorite : les composants d’ordinateurs.
Transformer la matière en énergie
Mais les déchets, en plus d’être de potentiels objets recyclables et modulables, peuvent être aussi une importante source d’énergie. Les déchets organiques, lorsqu’ils ne sont pas utilisés comme compost et fertilisant pour les exploitations agricoles, peuvent se transformer en biocarburant. En Zambie avec Mutoba Ngoma ou au Rwanda avec Jean Bosco Nzeyimana, on fabrique des carburants, des huiles, du gaz. Et d’autres sociétés se sont lancées dans la fabrication de briquettes écologiques, pour remplacer le charbon.
Cette nouvelle génération d’entrepreneurs a donc compris qu’il fallait s’adapter à ce monde qui change, qu’il fallait redonner de la valeur aux déchets. Créer de nouveaux produits à partir de l’ancien, utiliser de nouvelles technologies ou tout simplement avoir une nouvelle idée. Et c’est sûr, ce n’est que le début.