La mission intégrée multidimensionnelle des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (la Minusma) vient de changer de représentant pour la troisième fois depuis sa création. Après le Néerlandais Albert Gérard Bert Koenders, puis le Tunisien Hamdi Mongi, c’est au tour de Mahamat Saleh Annadif, ministre tchadien des Affaires étrangères de prendre la tête de la mission onusienne au Mali. A lui de tenter de faire respecter l’accord d’Alger entre le pouvoir central de Bamako et les groupes armés du Nord. Zoom sur un diplomate tout terrain.
L’homme originaire du Tchad fait partie d’une importante communauté arabe de la région de Biltine. Il entame des études d’ingénieur en télécommunication à l’Institut Polytechnique à Madagascar, puis à son retour au pays en 1981 s’engage en politique en rejoignant le Conseil démocratique révolutionnaire (CDR) d’Ahmat Acyl.
Un parcours politique mouvementé
A partir de là, Mahamat Saleh Annadif ne cesse de grimper les échelons du parti : il devient le numéro 3 du CDR en 1982 puis secrétaire d’État à l’Agriculture en 1989. En 1991, il se voit même confier la direction des télécommunications internationales du Tchad. Un moment marquant dans sa carrière politique est la formation de son propre parti politique, le Parti pour les Libertés et le Développement (PLD). Une stratégie gagnante qui lui permet d’être nommé ministre des Affaires étrangères, poste qu’il occupera de 1997 à 2003.
De 2004 à 2006, il devient chef de cabinet du président puis secrétaire général de la présidence de 2010 à 2012. Son parcours politique l’amène également à exercer à l’extérieur du continent: il fut aussi, de 2006 à 2010, le représentant permanent de l’Union africaine auprès de la Commission européenne.
Une grande et précieuse expérience qui a certainement appuyé la candidature du Tchadien au poste de commandant de la Minusma. Mais c’est avant tout son expérience en matière de conflit international, à fortiori sur son continent, qui a convaincu l’ONU. En effet, durant son parcours, Annadif a été l’un des acteurs majeurs lors de plusieurs processus de paix en Afrique : au Niger, en République Centrafricaine ou encore au Soudan.
Une nouvelle mission de taille pour Annadif
De l’expérience, Mahamat Saleh Annadif en aura besoin tant sa tâche s’annonce compliquée. Créée le 25 avril 2013 par la résolution 2100 du Conseil de sécurité des Nations unies, la Minusma succède à la mission internationale de soutien au Mali sous conduite africaine (MISMA) le 1er juillet 2013.
Le Conseil de sécurité des Nations unies lui a imposé plusieurs objectifs: assurer la sécurité, permettre la stabilisation et la protection des civils, l’appui au dialogue ainsi qu’à la réconciliation nationale, mais surtout appuyer le rétablissement de l’autorité de l’État dans tout le pays. En outre, le Conseil de Sécurité souhaite permettre la reconstruction du secteur de la sécurité malien ainsi que promouvoir et protéger les droits de l’homme mais aussi l’aide humanitaire.
Prévu jusqu’en juin 2015, le mandat de la Minusma a été prolongé d’un an avec cette fois-ci un impératif simple : soutenir la mise en œuvre de l’accord de paix signé le 20 juin 2015, cela avec l’appui des quelques 10 000 casques bleus présents sur le territoire malien.
Des enjeux diplomatiques
Pour y arriver il faudra faire preuve, pour le nouveau patron de la Minusma, d’une grande diplomatie car c’est certainement ce qui a manqué à son prédécesseur. En effet Mongi Hamdi, qui vient de quitter la fonction alors qu’il était en activité depuis moins d’un an, a entretenu, tout au long de son mandat, des relations compliquées avec le gouvernement malien et surtout son président Ibrahim Boubacar Keïta. Sans parler des problèmes multiples pour entretenir un climat de paix durable dans le pays.
La Minusma n’est donc pas un choix de facilité, même pour le diplomate tout terrain qu’est Mahamat Saleh Annadif.