En 2015, le groupe Bolloré lance un chantier de rénovation de 1260 kilomètres de rail entre Abidjan et Ouagadougou. Un projet pharaonique estimé à l’époque à 2,5 milliards d’euros sur 10 ans et qui prévoit de traverser 5 pays : la Côte d’Ivoire, le Burkina Faso, le Niger, le Bénin et le Togo. Aujourd’hui, le projet prend forme, mais le groupe se retire du continent africain. En cause, la concurrence chinoise et les recours judiciaires à répétition contre le groupe.
En Afrique, le groupe Bolloré est depuis longtemps implanté sur le marché du ferroviaire. Il gère l’exploitation et la maintenance de 2.700 kilomètres de rails via trois concessions: Sitarail, Camrail et Benirail. Un réseau ferré qui a lui seul transporte un million de voyageurs et 2,6 millions de tonnes de fret par an.
L’ambitieux projet de Blue Line, initié en 2015, consiste en une rénovation de certains tronçons, mais aussi en la construction de nouveaux tronçons, notamment entre le Niger et le Burkina Faso. Il tente ainsi d’adapter le réseau ferroviaire aux échanges croissants entre pays africains, tant commerciaux que de population.
Le groupe Bolloré a d’ailleurs pensé ce réseau dans une stratégie économique globale, puisque la Blue Line permet de relier une partie du continent africain aux terminaux portuaires gérés par le groupe en Côte d’Ivoire, au Bénin et au Togo.
Le groupe Bolloré quitte l’Afrique
Mais le 31 mars 2022, revirement de situation. Le groupe Bolloré, qui a pourtant fondé une grande partie de sa puissance et de sa fortune sur sa présence en Afrique, a décidé de désinvestir le continent. Le groupe annonce la cession de l’intégralité de Bolloré Africa Logistics à MSC, un armateur italo-suisse, pour un montant de 5,7 milliards d’euros.
Bolloré Africa Logistics emploie plus de 20.000 personnes, et représentait en 2020 un chiffre d’affaire de plus de 2 milliards d’euros.
Cette cession pourrait s’expliquer par l’inflation du coût de la logistique, poussée par la crise du Covid, et la volonté d’investissement des entreprises de transport qui aurait permis au groupe de vendre au bon moment. Mais elle est également le symbole d’une perte de vitesse du groupe en Afrique. Moins appuyé par l’Etat français dans la signature de contrats, il a par exemple perdu en 2019 le port de Douala au Cameroun.
La Chine aux avant-postes sur le rail africain
Mais c’est surtout la concurrence chinoise sur tout le continent africain, notamment sur le rail, qui a affaibli le groupe français.
La rénovation du rail sur l’axe Dakar – Bamako a par exemple été confiée au gouvernement chinois. Tout comme le remplacement des lignes Addis Abeba – Djibouti (où la Chine a installé sa première base militaire en Afrique), et Mombasa – Nairobi, deux lignes originellement construites par la France et l’Angleterre. Depuis 15 ans, Pékin ne cesse de multiplier ses investissements en infrastructures en Afrique, qu’il s’agisse de ports, de routes, ou de lignes ferroviaires. Des investissements stratégiques qui font partie d’une stratégie globale, similaire aux nouvelles routes de la soie en Asie et en Europe, et qui a pour but d’assurer à la Chine un approvisionnement optimal en matières premières et un contrôle accru sur le commerce mondial.
Source des photos : yiramediacentre.com et leparisien.fr